Article mis à jour le 21 décembre 2024 à 14:13
Si le chantier de reconstruction des 36 logements sur la place du Puig semble presque faire l’unanimité, c’est loin d’être le cas pour la Déclaration d’utilité publique (DUP) décidée le 5 novembre 2024 par le préfet Thierry Bonnier.
Avec cet acte administratif, le préfet des Pyrénées-Orientales ouvre grand la porte à la « réhabilitation » du quartier Saint-Jacques de la mairie de Louis Aliot. Et c’est là que le bât blesse. Le projet concerne sept îlots dans le cœur historique de Perpignan et prévoit près d’une centaine d’expropriations. L’enveloppe de 117 M€ budgétée devrait permettre de bâtir 181 logements neufs.
L’arrêté précise que ces îlots « sont identifiés comme prioritaires dans le quartier et ayant fait l’objet d’arrêtés d’insalubrité, de péril imminent et de mise en sécurité, situés principalement le long des rues Llucia, rue des Potiers, de la Savonnerie, des Carmes, Fontaine Neuve et du Moulin Parès. »
Mais une partie des habitants du quartier, pour la plupart membres de la communauté gitane, ne l’entend pas de cette oreille. Avec, eux, plusieurs opposants étaient venus dénoncer les futures expropriations. En ce début décembre 2024, l’ouverture du chantier de reconstruction de l’îlot du Puig à Saint-Jacques était l’occasion rêvée pour les opposants de se mêler à la fête.
Silencieusement et avec seulement quelques panneaux en main, ils ont manifesté. Sur leur pancarte au format A4, on pouvait lire : « Non aux démolitions, oui aux réhabilitations », « Non aux 46 expropriations », « Monsieur le Préfet, annulez votre arrêté ! », « Transparence dans les attributions dans les logements sociaux ».
Pour Jean-Bernard Mathon, ancien membre de la Direction des affaires culturelles et membre du collectif de gauche l’Alternative, il ne s’agit pas de s’opposer au projet de reconstruction de l’îlot Puig, mais de contester la DUP signée par le préfet. « Nous considérons que l’utilité publique n’a absolument pas été prouvée. » Selon le militant, l’argument du péril ou l’insalubrité serait nul et non avenu. En effet, pour Jean-Bernard Mathon, les immeubles concernés ne seraient pas les plus mal en point dans le quartier.
« Démolition », « péril », et « expropriation », autant de mots qui effraient les habitants du Saint-Jacques
Si Nick Gimenez, une des voix qui compte dans le quartier, souhaite plus de participation de la communauté gitane dans les projets de réhabilitation, il se dit satisfait de ce premier acte de reconstruction. « Nous voulons être présents pour les réunions. On ne veut pas qu’ils fassent n’importe quoi, mais c’est déjà un bon début ».
Quant au neveu de Nick, Alain, surnommé Nounours, il a écouté avec attention l’ensemble des discours. Et pour lui, il faut absolument que les Gitans soient consultés sur tout ce qui concerne le quartier. S’il regrette que le candidat qu’il avait soutenu n’ait pas remporté l’élection municipale, Nounours aurait préféré un stade de foot ou un terrain de pétanque sur l’espace laissé vide par les ruines de l’ancien îlot.
Face aux bateaux, Nounours désigne une maison de l’autre côté du chantier. « Ils veulent fermer cette maison pour en faire une maison-tiroir. » Selon le Gitan, il y aurait 114 maisons-tiroirs à Saint-Jacques. Dans ce quartier aux multiples difficultés sociales et urbaines, ces maisons inoccupées seraient destinées aux relogements d’urgence. Mais Nounours conteste la procédure, « moi je préfère qu’ils nous les libèrent ces maisons-tiroirs ».
Alain Gimenez cite également l’exemple de cette habitante rue des Carmes. »Ils veulent expulser une Gitane qui vient de perdre son mari. Ils lui proposent 23 000 euros. C’est pas une honte cette somme ! Avec 23 000€, elle n’a même pas un camping. Mais c’est ça ou rien ! » s’emporte le Gitan.
La promesse d’une rencontre en préfecture et d’une visite guidée par les Gitans de Saint-Jacques
Après la fin des échanges, Nounours a pris à partie le préfet Bonnier, et Nathalie Vitras, sous-préfète en charge de l’égalité des chances. Ces deux derniers s’étaient attardés sur le chantier alors que le cortège avait quitté les lieux pour « un moment de convivialité ». Auprès de Thierry Bonnier, Nounours se dit heureux d’être bientôt reçu par le préfet.
Et lui rétorque : « Il était temps que vous me receviez ! On m’a dit que vous étiez humain. Et ça fait plaisir de le voir. Parce que depuis le préfet Chopin (NDLR en poste de 2018 à 2020), nous n’avons rencontré que des préfets qui veulent laisser le maire manœuvrer seul. Mais s’il y a un dégât, ce ne sera plus lui le patron », s’emporte Nounours. « J’aimerais que vous nous accordiez une heure pour faire le tour du quartier. Et voir tous les problèmes qu’il y a ici. » Après cette demande, et un échange de contacts, la délégation préfectorale a promis de fixer un rendez-vous dès le mois de janvier 2025.
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