Article mis à jour le 31 mai 2024 à 15:43
L’équipe organisatrice, parmi laquelle l’association SOS Racisme, a lancé ce lundi 5 juin le départ de deux semaines de conférences, expositions, et rencontres culturelles de toutes sortes autour de la Méditerranée, son histoire passée, son présent et les enjeux de demain.
Avec le souhait de proposer dans sept communes du département des espaces collectifs de débats et d’échanges pour lutter contre les idéologies haineuses mortifères.
Nostre Mar continue sa mue
En 2022, la première édition avait été rapidement organisée en réaction à la tenue du congrès du Cercle algérianiste de Perpignan qui commémorait alors l’indépendance de l’Algérie, proposant selon Dominique Sopo, président de SOS Racisme, «une vision angoissante du passé et du futur qui ne nous permettait pas de nous projeter dans un avenir souhaitable. »
L’édition 2023 se veut de plus grande envergure, avec deux fois plus de partenaires associatifs (Welcome 66, LGBTQ+ 66, SOS Méditerranée…) et entrepreneuriaux. Deux fois plus longue aussi avec deux semaines de festivités au lieu d’une. Et enfin plus étendue, sortant de la seule ville de Perpignan pour investir Elne, Peyrestortes, Canet-en-Roussillon, Port-Vendres, Rivesaltes avec le Mémorial et même Corneilla-del-Velcol.
« On a besoin de ce temps long, annonce Nicolas Lebourg, historien spécialiste de l’extrême droite, et co-organisateur. On a un travail immense et ces quinze jours ne sont pas de trop. L’antiracisme n’est pas quelque chose de hors-sol. Nous sommes partout chez nous sur ce territoire pour porter une parole antiraciste. »
La tâche est ambitieuse dans les Pyrénées-Orientales, département connu pour affectionner le vote d’extrême droite
Dominique Sopo se veut optimiste : « Quand il y a des offres culturelles riches qui permettent de rassembler les gens, on voit qu’il y a des gens bien, y compris dans des territoires réputés gangrenés par des idéologies racistes. » Le président d’SOS Racisme défend un festival amené à s’inscrire dans la durée, en permettant dans des lieux collectifs de fédérer les énergies et de faire émerger une parole nuancée, réfléchie, ouverte, à contre-courant des discours réactionnaires de plus en plus audibles dans certains médias et sur internet. Un festival pour « faire société », autour de l’histoire de la Méditerranée, et des enjeux d’aujourd’hui et de demain.
Les partenaires institutionnels du festival que sont le Département et la Région soutiennent le projet. Pour Agnès Langevine, vice-présidente de la région Occitanie « Il faut nous réapproprier cet espace public et proposer une autre vision de la Méditerranée que celle répandue par l’idéologie d’extrême droite et qui produit des discriminations. » Les organisateurs ont d’ailleurs exprimé toute leur solidarité envers l’association LGBTQ+ 66 dont les locaux ont été retrouvés tagués de propos haineux et homophobes dimanche 4 juin. « Il n’y a aucune rupture dans le combat contre le racisme, l’antisémitisme et les haines anti-LGBT » a fermement rappelé Nicolas Lebourg.
L’expansion du festival a une autre ambition : toucher le plus de publics différents
D’où les projections et événements organisés à Canet et Elne, les animations portées par le Foyer laïque du Haut-Vernet à Perpignan ou la compétition de foot et rugby touché organisée pour le dernier jour à Corneilla-del-Vercol.
Le programme de cette année met aussi à l’honneur l’Italie, avec la projection du film récent « Interdit aux chiens et aux Italiens » et deux conférences, sur l’héritage de la Rome antique au Palais des Rois de Majorque ce jeudi 8 juin, et sur les années de plomb qui ont endeuillé la grande botte entre les années 1960 et 1980, le lundi 12 juin. « Les évolutions politiques récentes en Italie ne sont pas neutres, poursuit Dominique Sopo, en ce sens ce n’était pas inintéressant de s’intéresser à ce pays. »
Mais il sera aussi question, entre autres, de « Femmes en Méditerranée », avec la conférence attendue de la seule imame française Kahina Bahloul ce mercredi 7 juin, et de Balkans, avec la rencontre du mardi 13 juin sur les Roms par l’historien Jean-Arnault Dérens. Autre temps fort, la venue de Jean-Loïc Le Quellec, anthropologue renommé pour son ouvrage sur les fake news archéologiques et qui viendra parler mythes et migrations demain soir au Clap Ciné de Canet. Sans oublier les expositions, avec notamment celle regroupant les œuvres de plusieurs photographes présentée à partir de ce mardi au Palais des Rois de Majorque.
Seule absente des festivités: l’écologie, essentielle pourtant dans une perspective antiraciste, tant les changements climatiques affectent aussi les populations du pourtour méditerranéen. Tous les organisateurs reconnaissent l’importance d’aborder les enjeux liés au changement climatique, à l’heure où les pseudo-arguments climatosceptiques se répandent comme une traînée de poudre, et où les migrations climatiques ont commencé. Pour se défendre de tout oubli, Dominique Sopo rappelle que le festival tient aussi grâce à un important effort de bénévoles : « si des gens veulent militer et ajouter cette thématique pour la troisième édition l’an prochain, ils sont les bienvenus », sourit le président d’SOS Racisme.
Tout le programme : https://www.facebook.com/nostremarfestival/