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Je m’appelle Sabrina, j’ai 18 ans et j’aime une fille

Article mis à jour le 5 décembre 2021 à 06:52

Je m’appelle Sabrina et j’ai 18 ans. L’école ? J’ai arrêté en 4e. J’étais déscolarisée et je passais mes journées chez mes parents sans rien faire. Je ne pouvais pas sortir, parce qu’ils ne voulaient pas.

♦ J’ai toujours considéré les garçons comme mes collègues.

Je ne comprenais pas trop ce qu’il se passait. Puis un jour, j’ai parlé avec une fille ; et plus le temps passait et plus je m’apercevais que je l’aimais. C’était bien plus que de l’amitié. C’est là que j’ai compris que j’aimais les filles.

Mais chez nous les gitans, c’est interdit. J’en ai quand même parlé avec mes cousines qui m’ont tout de suite comprise. Elles me disaient que ce n’était pas grave. J’ai alors beaucoup pensé à mes parents. Mais je ne savais pas trop comment leur dire.

Comme je suis gitane et que mes parents pensent que d’être avec une fille, c’est mal, je savais que ce que je venais de faire, ils ne l’accepteraient jamais. J’étais perdue…

© Idhir Baha

♦ Je crois en Dieu, et je sais que même pour Dieu ce n’est pas bien.

Malgré tout, un jour, je me suis décidée à leur dire. Je suis restée toute la nuit à réfléchir à comment leur parler. Je réfléchissais beaucoup, je savais que ça allait leur faire du mal. J’ai beaucoup pleuré. Et le lendemain, j’ai dit à ma mère que je voulais lui parler. Je lui ai tout dit. Je lui ai dit que j’aimais une fille. Et que je ne pouvais pas être avec un garçon. Que c’était plus fort que moi, que je devais être avec une fille.

Ma mère a beaucoup pleuré et moi aussi. Elle m’a dit que ce n’était pas bien ce que je faisais ; surtout par rapport à notre religion. Je me suis dit que peut-être avec le temps, elle finirait par m’accepter, par me comprendre. Je sais que dans son cœur elle m’aimera toujours. 10 minutes après elle a tout dit à mon père, qui m’a tenu le même discours.

Je sais que ce n’est pas bien ; mais je ne pourrais jamais me mettre avec un garçon, je ne suis bien qu’avec les filles. Et les années ont passé…

♦ J’avais 17 ans quand je me suis mise avec une fille malgré le refus de ma mère.

Elle a fini par refuser que je la vois. La seule solution que j’avais était de prendre la fuite. Même si je sais que ça a fait beaucoup de mal à mes parents. Je ne supportais pas de rester des jours sans ma copine. De ne pas se voir, ça a été très dur. Mon petit frère, lui, a de suite compris ; et il m’a aidée à avancer.

Après m’être échappée, je suis restée chez les parents de ma copine et j’ai immédiatement trouvé un travail. Ce qui m’a permis de louer un appartement ; à seulement 17 ans, avant même ma majorité. Aujourd’hui à 18 ans, je viens d’avoir mon permis et je suis indépendante.

Je suis la plus heureuse et j’espère juste qu’un jour ma mère finira par accepter qui je suis.

« On m’a beaucoup jugée ; il y a encore beaucoup trop de personnes qui pensent que d’être avec une fille ce n’est pas bien. Pour toutes les gitanes comme moi qui aiment les filles et qui n’arrivent pas à en parler avec leurs parents, je leur dis qu’il faut être forte et vous donner le courage d’en parler pour avancer. »

♦  « Colonnes d’expression », un projet de Made In Perpignan

Pour accompagner les jeunes dans leurs envies de se raconter et de témoigner des discriminations racistes, antisémites mais aussi anti-LGBT. Jeunes ruraux, urbains, étudiants, lycéens, travailleurs, chômeurs, riches, pauvres, engagés ou non… Ils ont tous quelque chose à raconter !

Régulièrement en 2021, nous publierons leurs témoignages (textes, images, stories) qui seront réalisés en atelier avec l’aide de nos journalistes. De quoi offrir un panorama original et vivant du quotidien de la jeunesse en France confrontée à ces discriminations. Ce projet a reçu le soutien de la DILCRAH pour 2021.

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Maïté Torres