Article mis à jour le 21 septembre 2024 à 11:47
Publié en 2005 le livre La Maternité d’Elne, L’histoire des 597 enfants d’Elisabeth a connu un immense succès auprès du public et de la critique en Catalogne du Sud. Sa traduction inédite en français est parue aux éditions Trabucaïre en janvier 2024. L’occasion de revenir sur ce livre et sur la maternité d’Elne, petite commune des Pyrénées-Orientales. Un livre d’Assumpta Montellà – véritable phénomène de société en Catalogne – aide à comprendre l’histoire de ce lieu. Photo ci-dessus © Mairie d’Elne.
Une maternité ouverte à toutes les femmes
La maternité d’Elne est un lieu chargé d’histoire et d’émotions. En février 1939, La Retirada voit 500.000 Espagnols et Catalans quitter leur pays en guerre pour se réfugier dans les Pyrénées-Orientales. Malgré le danger, les actions de plusieurs personnes ont permis de sauver de nombreuses vies. C’est le cas d’Elisabeth Eidenbenz, une enseignante et infirmière suisse, qui mènera un combat sans relâche pour faire ouvrir la Maternité Suisse d’Elne et y faire naître 597 enfants entre décembre 1939 et avril 1944.
La directrice de la maternité a accueilli des femmes et des enfants d’une dizaine de nationalités différentes. La plupart subissaient de terribles conditions d’internement au sein des camps d’Argelès-sur-Mer, de Saint-Cyprien ou de Rivesaltes. À partir de juin 1942 la maternité est rattaché à la Croix-Rouge Suisse et doit se soumettre aux lois de Vichy. Élisabeth Eidenbenz refuse et poursuit l’accueil des réfugiés sans distinction de leur origine ou de leur religion.
Acquise en 2005 par la commune d’Elne et classée Monument historique depuis 2013, la Maternité Suisse d’Elne témoigne de l’entraide et du dévouement des jeunes volontaires membres d’associations humanitaires. L’ancienne maternité fait partie des projets départementaux de la Mission du Patrimoine de 2023.
597 enfants et autant d’histoires différentes
Dès les premières lignes, Assumpta Montellà tient à préciser qu’il n’y a pas une seule histoire de cette maternité mais plusieurs. « En fait elles sont 597, car sur chaque mère, sur chaque enfant né sous la protection d’Elisabeth Eidenbenz, on pourrait écrire un livre en soi, parce qu’ils sont tous les héritiers d’une débâcle qui n’a jamais été bien expliquée ».
Couverture et texte © Assumpta Montellà / Éditions Trabucaïre.
Ce livre est pour elle un moyen de rendre hommage à Elisabeth Eidenbenz. « J’aimerais que ces quelques mots soient un dernier hommage à cette femme exceptionnelle ». L’auteur écrit qu’il « ne faut pas taire ces choses-là », et pourtant la Retirada reste une période méconnue de l’Histoire.
Assumpta Montellà poursuit son écriture « Des histoires de tous les jours, racontées à la première personne, témoignages d’une époque et d’un pays qui a perdu une guerre, avec ses horreurs, ses souffrances et ses misères ». Elisabeth Eidenbenz, déclarait en juin 2005 « Personnellement, j’ai la satisfaction de penser que ce lieu a été un îlot de paix au milieu de cet enfer. » Le livre comporte quelques photos de l’ancienne directrice de la Maternité Suisse d’Elne entourée des enfants de la pouponnière.
Des enfants unis et liés à tout jamais par la maternité d’Elne
Dans son épilogue, Assumpta Montellà précise sa méthode d’écriture. Elle a contacté Elisabeth Eidenbenz pour lui faire part de son projet puis les deux femmes se sont rencontrées près de Vienne. L’auteure se remémore « je connaissais la plupart des choses qu’elle m’expliquait, mais racontées par elle, cela prenait une autre dimension. […] Elle mit à ma disposition toutes ses archives : photographies, documents, lettres et correspondance. Tout était classé par date, nom et thématique. […] Cela décrit la capacité d’organisatrice d’Elisabeth, qui lui avait tant servi pour diriger la Maternité. »
« Beaucoup d’enfants voulaient exprimer publiquement leurs remerciements à la femme à qui ils devraient probablement la vie », précise Assumpta Montellà. C’est par cette volonté de rendre hommage à Elisabeth Eidenbenz qu’est né le livre traduit aujourd’hui en français par Michèle Petrescu.
« Tous les enfants sont frères par le fait d’être nés à la Maternité d’Elne sous la protection d’Elisabeth Eidenbenz. Et ce dénominateur commun a créé un lien entre eux. ».
Aujourd’hui ce sont de nombreuses familles, le plus souvent des descendants de ces bébés nés entre 1939 et 1944, qui ont donné le prénom Elna ou Nael (anagramme de Elna pour les garçons) à leurs enfants. Ces ambassadeurs de la maternité se réunissent tous les deux ans à Elne pour que leur histoire ne sombre jamais dans l’oubli.
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