Article mis à jour le 3 juillet 2023 à 09:25
La saison estivale arrive à grands pas et le département des Pyrénées-Orientales se prépare à une arrivée massive des touristes sur son territoire. Mais la situation de sécheresse inédite ainsi que les restrictions d’eau ne rassurent pas certains vacanciers. Les professionnels du tourisme déplorent un bashing* à leur encontre.
Le département des Pyrénées-Orientales peut-il se passer de la manne financière portée par les touristes ? En alerte maximale depuis le 10 mai 2023, les médias ont tous titré sur les nouvelles restrictions quant à l’usage de l’eau. Alors que les agriculteurs voyaient encore les possibilités d’irrigation réduites, le secteur du tourisme était relativement épargné. En effet, campings et les parcs de loisirs sont toujours à alimenter jeux d’eaux et piscines, contrairement aux particuliers.
Au micro de France Bleu Roussillon, Brice Sannac, représentant l’union des métiers des industries de l’hôtellerie (Umih) des Pyrénées-Orientales, affirmait que le département n’a pas les moyens de se passer d’une saison touristique. Il maugréait : «Est-ce que demain, nous aurions les moyens de justifier de 50.000 demandeurs d’emplois supplémentaires ?». Aujourd’hui, il confie sur un ton grave, «si on ne fait pas la saison, on va dans le mur et on est mort».
«Dans les Pyrénées-Orientales, on fait le tourisme le plus vertueux de France»
Les mesures prises, pour l’instant, par la préfecture vont dans le sens du tourisme, mais surtout de l’économie. Et Brice Sannac s’en réjouit. «Les mesures vont dans le sens de l’économie parce que nous sommes les premiers pourvoyeurs d’emplois», glisse-t-il. Mais le temps n’est pas encore à la certitude. La situation ne s’améliore guère, et Nicolas Garcia ne cesse de le marteler à chaque rendez-vous : «Les nappes phréatiques sont à un niveau catastrophique». Quant aux acteurs du tourisme, les yeux rivés sur la saison et on répète que depuis des mois, un travail sur la question de l’eau est fait. Les professionnels l’affirment, le secteur ferait entre 30 et 50% d’économie d’eau. «Je peux garantir aux touristes que c’est que dans les Pyrénées-Orientales que l’on fait le tourisme le plus vert et le vertueux de France», s’enthousiasme même Brice Sannac.
Ce dernier, également hôtelier, illustre ses efforts et engagements pour lutter contre la problématique du manque d’eau. «Nous venons de faire le lavage de la piscine de l’hôtel aujourd’hui. Et j’ai évacué l’eau dans une cuve qui est mise à disposition des agriculteurs», souffle-t-il. Mais tous les professionnels du tourisme sont-ils aussi consciencieux que Brice Sannac ? Toujours est-il que les contrôles chez les professionnels, mais aussi chez les particuliers, se renforcent. Le temps de la pédagogie a laissé place à la sanction. Les manquements aux restrictions d’usage de l’eau sont punis de 1.500 et 7.500€.
La saison estivale attirera-t-elle autant de touristes que les années précédentes ?
Fait important à souligner, «les deux-tiers des touristes se logent chez des habitants du département», rappelle le préfet des Pyrénées-Orientales, Rodrigue Furcy. Un constat confirmé par le président de l’Umih : «Les premiers hébergeurs dans le département ce sont les habitants, pas les hôtels, pas les campings». Mais à Canet-en-Roussillon, l’office du tourisme confie que les réservations sont en hausse dans les campings sur la période juillet-août par rapport à l’an dernier.
À l’office du tourisme du Barcarès, le message diffère. Les appels au standard de l’accueil s’enchaînent concernant les mesures en restriction d’eau sur le territoire, et notamment dans les campings. «Les vacanciers nous appellent car ils ont peur que les campings mentent sur la situation».«Et ils nous demandent s’ils pourront avoir accès à la piscine de l’établissement». Des considérations bien loin des problématiques des «autochtones» du territoire, ces derniers s’inquiètent de savoir s’ils auront encore de l’eau dans leur robinet alors que débouleront les touristes. Au 26 mai, 23 communes du département sont surveillées de près concernant les ruptures d’eau. Ce sont trois de plus qu’il y a deux semaines, dont une où la situation est réellement critique.
De la transparence envers les vacanciers
Yann Marlic est directeur du camping Le Brasilia, à Canet-en-Roussillon et confie communiquer avec ses clients sur la situation dans le territoire. «Nous envoyons des consignes aux vacanciers de notre camping, notamment sur les problématiques d’eau». Une transparence totale avec les touristes qui est assumée par le directeur de l’établissement. «Les touristes profiteront d’un séjour touristique mais aussi d’un séjour pédagogique», poursuit-il. Et conclut : «Oui il y a des inquiétudes mais nous ne constatons pas une baisse de fréquentation dans le camping».
De son côté, Brice Sannac se veut rassurant, «moi ce que je dis aux touristes c’est qu’en venant dans les Pyrénées-Orientales on passe de bonnes vacances où les habitudes ne seront pas impactées». Il ne cesse de féliciter les professionnels du tourisme et reste confiant quant aux prochaines mesures du préfet. Même s’il garde une crainte pour la saison. «Ce n’est pas la sécheresse qui me fait peur, c’est le bashing de certains médias. (…) La sécheresse ne me fait pas peur parce qu’on a trouvé les mesures».
Des piscines municipales contraintes de fermer pendant l’été
Face à la situation, plusieurs communes ont fait le choix de ne pas ouvrir leur piscine municipale. C’est le cas pour la commune du Boulou. Plus récemment, la commune Ille-sur-Têt a également annoncé que sa piscine municipale en plein air resterait fermée cette année en raison de la sécheresse. La commune en vigilance accrue quant à l’approvisionnement en haut des habitants, le conseil municipal a acté la décision.
Un antagonisme entre piscines de campings, parcs de loisirs ouverts pour les touristes et restrictions maximales pour certains habitants du territoire. L’an dernier, le département des Pyrénées-Orientales avait enregistré plus de 6 millions de nuitées. Cette saison battra-t-elle les records d’affluence de l’an dernier, malgré la situation de sécheresse inédite ? Réponse dans quelques mois.
*Bashing, anglicisme : fait de dénigrer