Article mis à jour le 2 décembre 2022 à 08:26
Du soutien aux Ouïghours à la lutte contre la précarité menstruelle, d’une simple lettre à Emmanuel Macron aux actions sur les réseaux sociaux, les jeunes des Pyrénées-Orientales s’engagent et mobilisent autour d’eux. Clara Malavergne, lycéenne à Céret, revient pour la rédaction sur ces initiatives qui font avancer les causes.
♦ Les lettres à Emmanuel Macron et à Jean-Michel Blanquer pour que la France boycotte les Jeux Olympiques chinois
Quelques jours avant la cérémonie d’ouverture des jeux d’hiver de Beijing, des lycéens ont envoyé leur lettre à plusieurs personnalités politiques. L’objectif était de peser sur la décision de la France pour qu’elle ne se rende pas « complice » du génocide chinois envers la minorité des Ouïghours. Paloma Sabatier, 16 ans, lycéenne à Céret, écrit : « Monsieur le Président, (…) j’ai l’humble espoir que mon désaccord et les arguments tenus au cours de cette lettre suscitent chez vous une réflexion. (…) Je suis convaincue par le boycott politique des JO. Ce serait pour la France une opportunité rare et pacifique de protester contre le gouvernement chinois. (…)
À moins qu’elle ne veuille apparaître complice de la politique chinoise et du génocide des Ouïghours ». Delphine Martonfalvi, professeur d’histoire, spécialité HGGSP* au lycée Déodat de Séverac, revient sur la genèse de ces lettres. « Tout est parti d’un débat spontané autour de l’organisation des JO. Je leur ai demandé si la France devait ou non boycotter politiquement les JO de Pékin, au nom du soutien au peuple Ouïghour ? Je leur ai demandé une réponse personnelle autour de ce vrai positionnement géopolitique ». Finalement les jeux de Pékin 2022 se sont tenus sans qu’aucune délégation diplomatique française ne soit présente.
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♦ De lycéen à futur citoyen engagé ?
Pour Lola Grima, 16 ans, l’écriture de cette lettre est un réel moyen de s’impliquer dans la société. « Participer à ce projet m’a permis d’avoir une expérience sur comment agir dans la société. Et ça fait du bien d’être reconnu à notre échelle. Je trouve qu’on parle beaucoup du manque d’investissement des jeunes, alors que je nous trouve très investis. D’autant que nous sommes le futur et on s’en sort plutôt pas mal ! »
« Ce projet m’a permis de rendre compte de ma situation de jeune citoyenne française« déclare Paloma Sabatier. Elle se dit lucide sur le poids de cette action, mais la considère « cruciale ». « Même si malheureusement l’avis de dizaines ou de centaines de lycéens importe peu pour le gouvernement français et ses décisions en termes de politique étrangère, c’est avec des gestes forts et symboliques que l’on fera bouger les choses ».
Pour l’enseignante, il était important que l’opinion de ses élèves soit prise en compte. Selon madame Martonfalvi, « certains ont appréhendé, quand d’autres ont mis en doute la possibilité d’avoir une réponse ». La professeure au lycée de Céret nous confie : « Je leur ai expliqué qu’ils avaient le droit d’interpeller leurs dirigeants sur cette question. J’estime que ce type d’action est essentielle à la fois pour leur parcours personnel et la manière dont ils s’inscrivent dans notre société. À mes yeux, ils ne sont pas « simplement des élèves », mais bien les futurs citoyens, votants, de notre pays. Cette démarche vise autant à les faire réfléchir sur les responsabilités de nos élus, et la difficulté de devoir trancher sur des questions essentielles qui engagent le pays au niveau international ».
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♦ Le « projet-serviette » pour « briser le tabou des règles »
À la rentrée 2021, une lycéenne de Céret a mis en place un système d’entraide ouvert à tous pour lutter contre la précarité menstruelle. « J’ai entendu dans les toilettes une jeune fille demander une serviette hygiénique de dépannage. Je me suis dit que ce n’était certainement pas la seule ». Un pari réussi, puisque depuis l’installation, même les mentalités ont évolué et ont aidé à lever le tabou des règles. Pour Lola, « il s’agit d’un projet commun pour se sentir plus en confiance avec le sujet des règles. Je pense que le tabou devrait être brisé depuis bien longtemps. Le « projet-serviette » a permis de décoincer tout le monde sur ce sujet et tous y participent« .
Selon Francesc, 16 ans, « le fait que ce soit une lycéenne qui ait lancé le projet est à souligner, il répond à un réel besoin ». Pour le jeune homme, « il est révélateur de la volonté des jeunes de faire bouger les choses. Les règles ne devraient pas être un tabou, et c’est grâce à ce genre d’initiative que les mentalités changeront. En tant que garçon, je soutiens totalement ce projet ; il est nécessaire d’être éduqué sur le sujet des règles, même lorsqu’on n’est pas concerné directement ». Le « projet-serviette » a donc permis à tous, y compris aux garçons, de prendre conscience du sujet des règles et des problématiques que cela engendre.
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♦ Les réseaux sociaux au cœur de l’action des jeunes
A l’image de Maryam qui signe, via le compte Instagram Perpignan For Uyghurs, la pétition pour que la France reconnaisse le génocide des Ouïghours, les jeunes créent des communautés sur les réseaux sociaux. Autour d’un hashtag ou d’une personnalité, les réseaux sociaux permettent de réunir autour d’un sujet commun. Avec l’inscription #GenocideOuïghours au creux de la main, Sarah a aussi participé à la pétition. Lola voit les jeunes s’impliquer chaque jour d’avantage, via des comptes engagés ou des partages d’appel au don via des stories.
Lors de sa venue au Mémorial, Raphaël Glucksmann répondait à la question « Que pouvons-nous faire ? ». Il faut poursuivre la mobilisation. Et notamment via les réseaux sociaux. Grâce aux campagnes et à l’emballement du hashtag #freeOuïghours, la commission Européenne a, pour la première fois, pris des sanctions à l’encontre de 4 dirigeants chinois.
Les réseaux sociaux contribuent aussi à la mise en lumière de diverses causes. L’information diffusée sur Instagram permet autant la mobilisation que l’action. Le #BlackLiveMatter, la lutte contre les discriminations LGBT, la question environnementale ou la crise en Ukraine sont autant de sujets fédérateurs pour les jeunes.
*Histoire, Géographie, Géopolitique et Sciences Politiques.
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