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Dans le silence très bruyant d’une classe de Perpignan, un ours viendra

Résidence de journaliste à l’école primaire Pasteur-Lamartine dans le quartier du Bas-Vernet à Perpignan. Cette semaine, les élèves se préparent à interviewer l'ours de Saint-Laurent-de-Cerdans qui viendra leur rendre visite demain.

Article mis à jour le 25 avril 2023 à 08:08

Faire découvrir (et pratiquer !) la radio à des enfants d’élémentaire, mais aussi s’immerger dans une école pour aider les enseignants à monter des projets d’éducation aux médias et à l’information, c’est tout le but de la résidence de journaliste qui se tient jusqu’en juin au sein de l’école primaire Pasteur-Lamartine dans le quartier du Bas-Vernet à Perpignan. Cette semaine, les élèves se préparent à interviewer l’ours de Saint-Laurent-de-Cerdans qui viendra leur rendre visite demain.

Elle est animée par l’association Mediaclic, cofondée par notre reporter Alice Fabre. Made in Perpignan est le média partenaire de cette action soutenue par la DRAC Occitanie.

« Les enfants de la classe adorent parler face à l’enregistreur »

En ce lundi de retour de vacances, les enfants sont pour le moins… en forme ! Nous passons la journée avec les CM1-CM2, et l’attention a du mal à se fixer plus de quelques minutes. Il faut dire que la semaine s’annonce chargée à l’école Pasteur – Lamartine : c’est Carnaval ! Demain (jeudi 9 mars), l’ours de Saint-Laurent-de-Cerdans va descendre de sa montagne pour initier les élèves à cette fête millénaire. Un après-midi réjouissant est prévu, avant une journée déguisée le lendemain. Et en bonnes journalistes en résidence, nous nous sommes adaptées à ce programme pour la séance du jour, qui tourne autour du reportage et de l’interview.

Je suis toujours équipée de mon micro, qui, je le découvre petit à petit, devient un formidable allié pour demander le calme dans la classe. Les enfants adorent parler face à l’enregistreur, ils aiment que je les enregistre même si certains sont plus timides que d’autres. Séance après séance, ils découvrent le plaisir d’entendre au casque les bruits amplifiés qui nous entourent, même les plus anodins comme la craie sur le tableau noir ou le plastique d’une bouteille d’eau. Ils aiment aussi entendre les voix de leurs copains ; et quand je sens la patience me quitter, je leur fais écouter le bruit ambiant de la classe, et ils réalisent à quel point leur vision du silence est en fait très relative.

Un silence « très bruyant » comme j’aime à leur signaler. Ça les calme un peu, pas longtemps hein, mais assez pour avancer.

Nous abordons donc plusieurs notions essentielles au métier de journaliste. D’abord le reportage puis l’interview.

Le reportage, aller sur le terrain, au cœur d’un événement et des faits pour relater ce que nous constatons et interroger les différents acteurs présents. On insiste sur l’importance de l’ambiance, et aussi sur le fait de faire le reportage pour ceux qui vont nous lire/voir/écouter, ceux qui ne peuvent pas assister comme nous au fait d’actualité. C’est un concept un peu flou encore pour eux, raconter pour les autres, poser des questions au service d’un public absent physiquement mais à qui nous devons rendre des comptes. Nous esquissons sans l’avoir prévu les principes déontologiques du journalisme.

Après le reportage (et la sempiternelle méthode des 5W – 6 en fait:  Qui, quoi, où, quand, comment, pourquoi – pour ne rien oublier d’important), nous nous attaquons à l’interview. On prévoit d’utiliser la salle webradio de l’école jeudi pour animer une petite émission autour de la fête de l’Ours, et de poser des questions à l’homme sous la peau animale, mais aussi aux musiciens, aux chasseurs, et même à la directrice.

C’est aux élèves de plancher. Par petits groupes, ils se creusent la tête pour trouver des idées de questions pour l’ours de Cerdagne.

Avec Barbara, on insiste gentiment, on essaye des chemins détournés : « qu’est-ce que vous avez envie de savoir ? Qu’est-ce qui vous surprend ? » Les yeux se lèvent, un peu dans le vide, clairement ils sont en pleine digestion, de la cantine oui mais aussi plus généralement des vacances, qui les ont éloignés d’un rythme scolaire (et aussi de travail) pendant quinze jours.

Et puis l’étincelle survient. Alors qu’on tente de débloquer l’imagination de certains, d’autres ont déjà noirci leur feuille de phrases interrogatives. Il y a quelques perles : à la directrice : « pourquoi ne pas vous déguiser en ours ?», aux musiciens « avez-vous connu des hauts et des bas dans votre carrière ». Je me figure un joueur de cobla assis jambes croisées, une cigarette aux lèvres, retraçant son immense carrière à la fête de Saint-Laurent-de-Cerdan, et j’esquisse un sourire.

Et puis d’autres idées auxquelles on n’avait pas forcément pensé : est-ce que celui qui fait l’ours doit s’entraîner ? Pourquoi c’est réservé aux garçons ? C’est une fille qui a posé cette question. Je remarque que les filles sont beaucoup plus appliquées que les garçons : elles respectent scrupuleusement les consignes, sont moins bruyantes aussi, même si elles peuvent être agitées et bavardes. Et voilà une case de cochée dans le bingo du stéréotype de genre à l’école.

Maïté est venue nous prêter main-forte pour les classes de l’après-midi. Sa présence me permet d’enregistrer davantage de matière sonore pour documenter cette expérience nouvelle, pour eux comme pour nous. En ce deuxième mois d’intervention, on reconnaît maintenant aisément nos visages, les élèves nous arrêtent dans les couloirs et nous appellent par nos prénoms. Les enseignantes, elles, commencent à s’habituer à notre présence dans la salle des maîtres.

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Alice Fabre