Article mis à jour le 15 septembre 2022 à 10:57
Malgré de nombreuses relances, aucun citoyen n’aura posé de question au Ministre de la justice ce jeudi lors du débat autour des Etats Généraux de la justice. Durant près de 2 heures, l’ancien ténor du barreau a dû répondre à des questions sur « la clochardisation » du tribunal de Perpignan, le manque chronique de moyens, la surpopulation carcérale ou encore la lenteur de la justice.
Eric-Dupond-Moretti a tenté de mettre en lumière les efforts considérables consentis sous la Présidence d’Emmanuel Macron, sans nier l’évidence. « Tout n’est pas parfait, mais on avance ». Quand certains rétorquent coup de com, Eric Dupond-Moretti avance les chiffres de participation aux Etats Généraux de la justice : 1 million de contributions sur la plateforme Parlons-Justice.fr. Quant au procès en instrumentalisation politique, le Ministre a finalement préféré reporter les conclusions de ces Etats Généraux. Initialement prévues au mois de mars, les restitutions se feront après l’échéance électorale de la présidentielle.
♦ Manque chronique d’effectifs au tribunal de Perpignan ?
Au lancement des Etats Généraux de la justice, nous avions questionné le Président du Tribunal de Perpignan sur le manque de moyens. « « Nous prévoyons des choses aujourd’hui, mais au moment de la mise en place, il est possible que les personnes ne soient plus là ou aient été remplacées ; avec toutes les difficultés de formation ou de connaissance des dossiers que cela pose. Sans vouloir se camoufler derrière le manque de moyen, c’est quand même une problématique bien réelle et récurrente ».
Plus sévère Delphine Despit, magistrate à Perpignan a interpelé jeudi soir le Ministre au sujet de l’effectif. « Nous sommes dans des délais indignes pour rendre la justice de la France. À Perpignan, un couple qui se sépare doit attendre 10 mois avant de rencontrer le juge. Un juge des familles doit suivre 600 dossiers. Où sont les 698 magistrats dont vous parlez ? Où sont les 2.000 assistants ? Certainement pas à Perpignan. À très court terme, quelles sont les perspectives pour les personnels de justice à bout de souffle ? » Le Ministre de la justice, visiblement agacé par l’intervention, de rétorquer : « 3 magistrats sont arrivés à Perpignan. Ils sont faits de chair et de sang ».
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♦ Une réduction du stock d’affaires de 38% à Perpignan
Eric Dupond-Moretti de rappeler les chiffres d’embauches de magistrats sous les précédentes mandatures. « Nous avons embauché 698 magistrats. Avant… 27, et le quinquennat d’avant… -140 » ; un chiffre lié au non-remplacement des départs en retraite. « Alors, oui il reste des choses à faire. Mais il nous faut connaître le nombre de magistrats nécessaires en France ». Avant de conclure que les effectifs supplémentaires avaient conduit le tribunal de Perpignan à « réduire son stock de 38% ».
Lors de la rentrée solennelle, le procureur de la République Jean-David Cavaillé rappelait : « Quand je suis arrivé, ce qui était effrayant pour moi, c’était de trouver des dossiers de 2012, 2013, 2014 et 2015 qui attendaient. (…) Des décisions rendues très loin après les faits sont de mauvaises décisions. » Le procureur précise qu’en ce début d’année, toutes les affaires antérieures à octobre 2021 ont une date d’audience fixée.
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♦ La seconde prison attendue pour 2026
Au-delà de son tour des juridictions pour porter la bonne parole, le Ministre a également confirmé les projets immobiliers dans le département. Eric Dupond-Moretti a confirmé l’ouverture d’un nouveau centre pénitentiaire pour 2026. Une prison qui comptera 515 places et qui s’inscrit, selon le Ministre, dans le programme de création nette de 15.000 places de prison.
Le directeur de la prison de Perpignan était également présent à ce débat. Dimitri Besnard a questionné le Ministre sur la possible mise en place d’un numerus clausus du nombre de matelas au sol. En ce moment, la prison compte 70 matelas au sol, et le directeur serait favorable à une limitation à 60 du nombre de ces matelas. « La principale difficulté que nous rencontrons avec mes équipes est la gestion de ces matelas au sol. Cela nous prend du temps. Et nous évoquons avec nos officiers un plafond de verre. Un numerus clausus qui pourrait être envisagé à Perpignan à 60 matelas au sol. Pensez-vous que l’application de ce numerus clausus puisse permettre de réduire le surencombrement et garantir des conditions dignes ? »
Fin de non-recevoir très nette de la part du Ministre. « Non, je suis contre ! Même si je suis très attentif aux conditions de la détention, les matelas au sol sont une honte ; c’est pour cela que l’on construit une nouvelle prison. (…) Mais que dirait-on si on n’emprisonnait pas quelqu’un qui aurait commis un acte grave ? (…) On répondrait, non, on a dépassé le chiffre ? C’est le loto pour vous monsieur, vous restez dehors ! Non, je suis contre cela. En revanche, je suis favorable, à chaque fois que c’est possible, à privilégier des alternatives à la prison. Nous serons au rendez-vous des promesses. Ces 15.000 nouvelles places n’ont pas été décidées au doigt mouillé, cela correspond à une réalité ».
L’essentiel…
Au cœur de l’échange, les résultats recueillis sur la plateforme « Parlons-justice.fr » et des problématiques telles que la lenteur de la justice française, les grandes difficultés du milieu pénitentiaire, les conditions de travail des acteurs de la justice ou encore les menaces pesant sur les élus de la République.
Durant le débat, la magistrate Delphine Despit s’est indignée de la lenteur des procédures et du manque cruel de personnel notamment des juges et magistrats instructeurs. Les acteurs de la justice revendiquent le fait de pouvoir travailler dignement.
Le Ministre de la justice tente de calmer le jeu en annonçant l’ouverture « très prochaine » d’un nouveau tribunal pour 2028.
Le garde des Sceaux évoque également la simplification des procédures pour le divorce ou les pensions alimentaires gérés désormais pas la caisse allocation familiale.
À l’évocation du terme « clochardisation » du tribunal de Perpignan, Éric Dupond-Moretti témoigne de son agacement et concentre sa réponse sur la « réalité des chiffres » et les moyens avancés. L’ex-avocat tient notamment la comparaison avec les anciennes mandatures. 38% de réduction du stock sur Perpignan et des procédures accélérées, l’augmentation du budget en réponse à la précarité évoquée (deux fois 8%), 698 magistrats embauchés ainsi que 2000 juristes assistants.
La protection des surveillants pénitentiaires et la surpopulation carcérale ont été évoquées à plusieurs reprises.
Éric Dupond-Moretti évoque une convention signée avec les syndicats pénitentiaires. Le Garde des sceaux veut faire des surveillants les acteurs principaux quant aux décisions de l’évolution du parcours carcéral du détenu.
Le Ministre de la justice a annoncé le projet de construction d’une nouvelle prison prévue pour 2026 avec pour objectif 515 places supplémentaires dans les Pyrénées-Orientales, et autant d’emplois directs et indirects.
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