Article mis à jour le 24 octobre 2023 à 15:25
La pandémie de Covid-19 a remis en cause l’organisation du territoire français, entre diversité des dynamiques territoriales et nécessité d’apprécier chaque territoire accompagné dans son contexte. Une étude commandée par le Ministère de la Transition Ecologique et de la Cohésion des Territoires a tenté de mieux connaître les ruralités françaises et leurs dynamiques. Alors l’exode urbain post-pandémie : mythe ou plutôt des réalités ?
La crise sanitaire a-t-elle réellement engendré un exode urbain ?
Les résultats le montrent : la pandémie n’a pas été source d’exode urbain ; mais a plutôt accéléré les départs en provenance des grands centres urbains – notamment des grandes métropoles – vers d’autres territoires, et en particulier des villes – plus petites – et des couronnes périurbaines. Aucun exode urbain n’est donc lié à la crise sanitaire ; en revanche, celle-ci a accéléré et renforcé des tendances préexistantes. Par ailleurs, les départs, principalement depuis les métropoles, ont amené des relocalisations dans des villes. Enfin, les mobilités observées depuis mars 2020 ne peuvent être qualifiées de mouvement massif de population.
Le profil des « exodeurs » semblait parfaitement défini dans les médias : parfois des ménages de classe supérieure, dotés d’un fort capital socioculturel et économique, et souvent des ménages qui souhaitaient changer de vie avec la « transition rurale » comme imaginaire.
Bien que ces deux profils existent, la réalité montre une plus grande diversité avec, parmi les ménages qui déménagent, des profils en situation de précarité et des pré-retraités ou encore des ménages avec l’envie d’un investissement en milieu rural.
Le monde d’avant des métropoles versus le monde d’après des campagnes ?
Les métropoles conservent leur rôle structurant dans l’organisation du territoire national. En regardant les recherches immobilières des Français en 2019, 2020 et 2021, force est de constater que les réalités sont similaires. Les tendances préexistantes à la pandémie se confirment : les grands pôles urbains, Paris, Marseille, Lyon, restent attractifs. Les flux de recherche immobilière captent également des métropoles régionales comme Lille, Strasbourg, Grenoble, Toulouse et Bordeaux qui concentrent de nombreux emplois et services.
Les données des contrats de réexpédition de courrier du groupe La Poste montrent que 36,5 % des déménagements se font de grande ville à grande ville après le début de la crise sanitaire et que les déménagements de commune rurale à commune rurale ne représentent que 7 % des déménagements, avec toutefois un léger essor. À noter également que plus d’un quart des déménagements du pays ont lieu au sein de la même commune. Les intentions de mobilité avant et après crise ne mettent pas en lumière une rupture territoriale.
Le littoral français attire toujours plus de nouveaux habitants mais il n’est pas le seul…
Depuis le début de la pandémie, les façades littorales sont devenues très attractives aussi bien dans les aspirations des Français que dans leurs mobilités. Les tendances observées depuis de nombreuses années se sont confirmées voire renforcées : les territoires dans le cœur de la Bretagne, le long de la vallée du Rhône ou dans le cœur de la Nouvelle Aquitaine accueillent de nouveaux habitants. De même pour le littoral, notamment la façade atlantique, qui enregistre une forte augmentation des soldes migratoires.
Toutefois, entre les deux années pré-Covid et les deux années post-Covid, deux phénomènes s’observent. D’une part, bien que très positifs, les soldes migratoires des littoraux sont marqués par une légère baisse dans certains territoires, ce qui pourrait être la cause d’une saturation des marchés immobiliers locaux. D’autre part, un certain nombre de territoires aux dynamiques migratoires plutôt faibles connaissent une variation positive importante, surtout dans le cœur du Massif Central, au Nord de la Nouvelle Aquitaine et dans le piémont des Pyrénées.
Où se dirigent les Français qui quittent les centres urbains ?
Nombreux sont les Français qui avaient fait part d’un « désir de campagne » après les confinements. En tenant compte des données de la plateforme leboncoin concernant les Français qui consultent les annonces immobilières, il apparaît que, sur l’ensemble des flux observés, ceux concernant les mouvements de l’urbain vers une maille rurale ne représentent qu’une minorité (14 %). En revanche, les flux entre mailles urbaines représentent à eux seuls 28 % des projections. Le phénomène de départ des villes vers les campagnes existe mais n’a pas été accentué par la pandémie.
Les habitants des centres urbains les plus tendus optent, dans des proportions proches, aussi bien pour des zones rurales que des franges périurbaines, des métropoles et des villes moyennes moins tendues. En revanche, ils évitent les mailles les plus tendues des périphéries urbaines y compris le périurbain.
Les Français désireux de quitter un grand centre urbain ne se dirigent donc pas uniquement vers la campagne. Ils rejoignent aussi des villes, petites et grandes.
S’il ne s’installe pas dans une couronne périurbaine, il ira dans une ville un peu plus petite que celle qu’il quitte. Ce phénomène s’est accéléré depuis le début de la pandémie, et de façon beaucoup plus intense au départ des plus grandes unités urbaines.
Quel bilan tirer de cette étude « Exode urbain : un mythe, des réalités » ?
Premièrement, les grandes villes concentrent toujours une part importante des déménagements français, avec 43 % des emménagements dans les grandes villes. Deuxièmement, les flux qui quittent les villes plus grandes vers les villes plus petites sont plus importants que ceux qui quittent les villes plus petites vers les villes plus grandes. Le desserrement urbain, la périurbanisation, la renaissance rurale et le renforcement de l’attractivité des espaces de villégiature entraînent un processus de rééquilibrage dans l’armature urbaine française.
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