Article mis à jour le 12 janvier 2022 à 20:04
Tel pourrait se résumer la pensée exprimée par le maire du Perpignan lors du conseil municipal du 16 décembre. En prélude à cette dernière session de l’année, l’opposition via Bruno Nougayrède s’interroge et qualifie de « gaspillage d’argent public » les 26.400€ déboursés pour une étude d’opinion réalisée l’été dernier. Une « fausse enquête digne de Tintin au pays des Soviets » ? Louis Aliot rétorque : « ça s’appelle un quali. Vous savez ce que c’est ? ». Si, vous aussi, vous avez pensé immédiatement au célèbre chanteur catalan Cali, que nenni ! En spécialiste du sujet, le maire évoque l’abréviation « quali » (qui au passage n’est pas valable au Scrabble) pour « qualitative ».
♦ « Une fausse enquête digne de Tintin au pays des Soviets » ?
En ouverture du conseil, Bruno Nougayrède interpelle donc Louis Aliot à propos d’une étude dite « qualitative ». L’appel d’offres indiquait que la mairie souhaitait « appréhender l’opinion des Perpignanais » afin « d’orienter (…) l’animation des politiques publiques et la communication afférente ». En clair, un an après son élection, le maire souhaite prendre le pouls des Perpignanais sur son action ; histoire d’ajuster sa politique si nécessaire. Après avoir dépensé plusieurs milliers d’euros dans les audits de la ville, le maire s’en remet à l’avis … de 21 Perpignanais.
Mais de quoi s’agit-il ? Le vendredi 2 juillet 2021, les services de la mairie demandent des devis à divers prestataires. Un seul répond et réalise l’étude en un temps record. Il constitue ses panels et mène ses réunions dès les mardi et mercredi suivants (les 6 et 7 juillet). L’étude qualitative, contrairement à une étude quantitative du type sondage, est « une étude en profondeur de nature psychologique. Et qui cherche à expliquer les comportements, les motivations ou à guider des recherches créatives ». Ce type d’enquête se base sur un panel très réduit, entre 8 et 10 personnes conviées à des réunions de 3 heures environ.
Dans le cas de Perpignan, Christophe Gervasi choisit 3 groupes de 7 personnes pour mener son enquête. Le consultant mène des réunions de 2h30 à l’hôtel Ibis. Le premier groupe est composé de 7 personnes âgées de 25 à 55 ans, actifs et « habitants les divers quartiers de Perpignan ». À l’image du deuxième nommé « retraités » qui regroupe des personnes entre 55 et 70 ans. Enfin, le troisième groupe de 7 personnes est composé de « jeunes » entre 20 et 32 ans, « actifs ou inactifs ». Ces 21 personnes sont considérées comme représentatives des 121.934 habitants de Perpignan.
♦ Que dit ce « quali » de 96 pages ? Que pensent les 21 Perpignanais questionnés ?
Le panel a été questionné sur plusieurs grands sujets. L’image et l’identité de la ville, ses « marqueurs structurants », ou encore « le maire et la municipalité » ; et enfin « l’action municipale, le bilan et les attentes« . Sur la personnalité de Louis Aliot, l’énumération des « marqueurs » issus des propos des 21 Perpignanais est une véritable litanie.
« Simplicité, proximité, rassurant » ; « volonté, dynamisme, jeunesse » ; « honnêteté, franchise, courage » ; « rassembleur, charisme ». Parmi les points saillants, on peut aussi lire qu’il est « un homme de terrain » et « d’ouverture ».
Si l’étude indique que « les 21 » connaissent assez mal le parcours politique ou les anciens mandats de Louis Aliot, elle montre qu’ils sont plus intéressés par la vie privée du nouveau maire. Par exemple, « sa proximité partisane et affective avec Marine Le Pen est clairement identifiée ». Pour rappel, Louis Aliot a été le compagnon de Marine Le Pen durant une dizaine d’années.
Un des jeunes « représentatifs » parmi les 7 questionnés met même en avant le mariage de Louis Aliot. « C’est pas un mec dépressif, à certains moments de nos vies on peut flancher et faire n’importe quoi. Lui il est dans un bon truc, il est heureux, il va se marier ». Un heureux événement qui s’est tenu mi-juillet dernier.
♦ Le logo en voit de toutes les couleurs : « Ringard à souhait, vraiment pas ouf ! »
Au-delà d’un sentiment de gâchis d’une ville avec tant d’atouts et pourtant si mal-en-point, les phrases mises en avant par le sondeur montrent un avis très négatif vis-à-vis de l’ancienne équipe municipale. Le sondeur met en exergue ces éléments pour expliquer la défaite de l’ancien maire, et la victoire du nouveau. Un « homme décrit comme usé, incarnation d’un système clientéliste en bout de course » contre « un élu qui a su rassembler sur sa personne ».
Quant à l’action municipale ? La nouvelle équipe propose « une dynamique locale qui progresse doucement » grâce à « une communication d’accompagnement jugée utile et efficace ». Petit bémol concernant le logo de la ville. Dévoilé en avril 2021, ce nouveau blason avait fait grand bruit, autant sur le fond que sur la forme. Plusieurs critiques sont avancées, surtout sur le panel des jeunes et des actifs. Saint-Jean Baptiste, non identifié. « Comme un berger avec un béret, non ? Il a quoi dans les mains ? Une épée et un mouton ? On dirait Jésus ».
Un blason à connotation religieuse jugé non conforme à la laïcité. « Mettre quelque chose de religieux sur un logo d’une ville, c’est pas représentatif de tous les citoyens et c’est même une honte ». Enfin c’est son esthétique qui est raillée. « Ringard à souhait, vraiment pas ouf ! » ou « On dirait un vieux club de foot low-cost ».
Pour rappel, le changement de logo de la ville avait coûté 12.000€ ; sans compter le coût de la mise à jour de l’ensemble de la signalétique.
♦ Qu’attendent les 21 Perpignanais de leur maire ?
Le sondeur débute cette partie par une citation d’une des personnes du panel des jeunes. « J’étais choquée quand je suis venue ici qu’il y avait pas de Zara, je n’ai pas trop compris ». Au-delà de cette demande, l’étude résume les attentes des 21 panélistes en 7 points. Dynamisme du centre-ville, meilleure cohésion sociale viennent compléter « la sécurité comme axe cardinal ».
♦ Enquête indépendante ?
En octobre dernier, après la parution du numéro 6 du journal municipal, le journaliste Julien Marion avait enquêté sur l’auteur de l’étude annoncée comme « 100% indépendante ». Qui a fait le choix des propos conservés dans la synthèse ? Comment Christophe Gervasi a-t-il fait le tri entre les propos à conserver et ceux à exclure de la synthèse de 96 pages ? Grâce à son expérience de 20 ans ; un long parcours qui inclut de nombreuses collaborations avec le parti du Rassemblement National. Après étude des comptes de campagne de Marine Le Pen, les journalistes de l’Express avaient notamment soulevé le versement de 189.814 euros à Christophe Gervasi.
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