Article mis à jour le 11 avril 2023 à 07:46
La 33e édition du Festival Jazzèbre se tiendra du 18 septembre au 10 octobre à Perpignan. Pour sa dernière édition en tant que directeur artistique de ce festival, Yann Causse nous a accordé une interview. Il revient sur cette belle aventure qui a rythmé sa vie depuis 33 ans et nous évoque ses projets. Comme un avant-goût de la rencontre organisée avec le public le samedi 9 octobre à 14h30 à la médiathèque de Perpignan.
♦ Vous étiez donc présent à la création artistique du festival ?
Oui, quand on a démarré, il y a 33 ans, c’était 4 soirées à Perpignan. Mais il y avait déjà un mélange entre les musiques du monde et le jazz. 4 jours pour commencer ; puis on a attendu d’être à la 6e ou 7e année pour avoir quelque chose qui correspondait à un festival plus posé, qui prenait plus son temps, qui permettrait de découvrir une palette plus large de musiciens. Assez vite, on est sorti de Perpignan.
On a créé des moments Jazz et Vins ; des évènements conviviaux conçus comme une porte d’entrée pour les gens qui ne venaient pas forcément en salle. Ensuite, il y a eu La Casa Musicale où l’on revient. Au bout de la 6e-7e année, je me suis dit « on commence à être un peu plus mûr » – ce qui n’était pas complètement vrai – et « on va pouvoir aller rencontrer les collègues ». Et donc on s’est inséré dans des réseaux.
♦ Un réseau musical ?
Des réseaux nationaux d’abord ; puis Marciac plus récemment. C’est un réseau de fédération de festivals de jazz au niveau national ; qui a été LE réseau national et LE réseau qui a donné beaucoup de pistes aux autres pays. J’ai été très impliqué là-dedans.
Pourquoi était-il nécessaire d’intégrer ce réseau ? Car on échange des expériences, on construit les projets ensemble. On vient créer un projet pour aider les jeunes musiciens à prendre place, petit à petit, dans le paysage ; concrètement en faisant des concerts, mais aussi avec de la formation. On peut aussi créer des relations avec l’étranger. C’est essentiel d’être dans des réseaux.
Plus tard, j’ai proposé à d’autres acteurs de la région – le Languedoc-Roussillon à l’époque – de se réunir et de créer un collectif, qui s’est transformé en réseau : Occijazz. On a créer des programmes de résidences pour les artistes. Pour moi, […] c’est ce qui soutient les artistes et c’est ce qui nous nourrit, nous aussi, nous inspire et nous donne du contenu. […]
Aujourd’hui, le fait de revenir enfin écouter de la musique en direct, c’est un total bonheur. Rien ne peut remplacer ça.
♦ Le 9 octobre, vous évoquerez avec le public 33 ans d’émotion, entre anecdotes et galères. Lesquelles ?
La première chose pour moi, c’est la fierté d’avoir accueilli bon nombre de musiciens qui, malheureusement maintenant, sont disparus. Et d’avoir fait – à la mesure de notre festival et de Perpignan – un festival international.
Des anecdotes, il y en a forcément beaucoup ; mais cela sera très réducteur… Il y a un musicien que j’adore qui s’appelle Egberto Gismonti, un brésilien, qu’on a accueilli, au théâtre, avec en première partie une formation où le tromboniste reprenait des chants de Haute-Loire. Il y a une fraternité avec la façon de parler brésilienne assez incroyable. C’est ce genre de petite alchimie comme ça qui sont les plaisirs d’un programmateur.
Des problèmes… il y en a eu forcément. À la 6e-7e édition, je pense qu’on a franchi une marche de trop. On a eu un festival déficitaire ; un souci rencontré également lors de la Coupe du Monde de rugby en France. Une partie de notre public était très intéressée par l’ovale, c’est la région aussi qui veut ça. On avait des concerts extraordinaires avec pas assez de monde devant.
Mais, malgré tout, c’est plein de beaux souvenirs, de rencontres, surtout celles avec les artistes qui restent, qu’on accueille en résidence, ou lors des tournées régionales. On a le temps d’être dans la musique, bien sûr, mais un peu au-delà, de la vie. La musique c’est aussi la vie.
♦ Le jazz votre spécialité au départ ou pas du tout ?
Je suis de la génération qui a eu de la chance d’avoir accès à des musiques très fouineuses, très curieuses : celle des années 70. J’étais très rock, des musiques un peu barrées, de tous les styles ; mais je n’étais pas très jazz. C’est par des rencontres que j’ai découvert le jazz plus ancien ; au travers de gens qui avait quand même déjà défriché énormément comme John Coltrane, Mingus. […] J’ai ressenti dans le jazz une certaine liberté. On reste un peu hors des formats.
La pop et le rock sont devenus beaucoup plus formatés ; même si en allant chercher derrière, on trouve toujours des gens hors-normes. Alors que le jazz, le formatage ne s’évite jamais complètement, mais il reste un terrain d’aventures pour les musiciens. Aussi bien dans leur créativité pure que dans les mélanges avec les autres musiques. Moi je m’y suis retrouvé complètement, j’ai plongé dedans, et ça fait 33 ans que je nage.
♦ Quel va être votre rôle maintenant ? Vous allez devenir bénévole ?
On est une trentaine de bénévoles, je vais rentrer au Conseil d’administration ; en tout cas, je vais être candidat. Mon rôle va être de créer les conditions de programmation pour les années à venir ; c’est-à-dire que je vais être conseiller artistique, et petit à petit, créer un pôle de programmation. Quelques personnes, présentes ici ou ailleurs, pour travailler à la programmation. Pendant deux ans, je vais encore être le programmateur avec Ségolène ; et petit à petit, on va élargir ce cercle pour que ça puisse se faire.
♦ Est-il question ou a-t-il été question d’avoir un parrain pour chaque édition ? Un artiste phare ?
Non. Ségolène a dans l’idée de travailler avec des « cartes blanches à des artistes » ; mais c’est pour le futur. On y a pensé dans les premières années, puis il y a plutôt eu des parrains officieux. Dans les dix premières années, c’était le trompettiste Michel Marre. Il était très présent et on échangeait. Maintenant, le partenariat – qui est une forme de parrainage – se retrouve plutôt dans nos compagnonnages à l’année. Cette année, c’est la clarinettiste Élodie Pasquier.
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