Article mis à jour le 28 août 2022 à 17:42
Après une première diffusion en septembre 2020 sur Arte, Les Afghans, sacrifiés au nom de la paix , rediffusé sur la même chaîne est disponible en replay, en écho à la situation actuelle en Afghanistan. Pour réaliser son documentaire, Alexandra Jousset est allée à la rencontre de la population afghane, marquée par la guerre depuis deux décennies, mais aussi des talibans et d’autres acteurs du conflit afghan.
♦ Les Afghans, sacrifiés au nom de la paix – Le Synopsis
Ce poignant voyage dans une terre ravagée par dix-neuf ans de guerre commence aux portes de Kaboul, dans le Wardak, à la rencontre des miliciens talibans qui tiennent la zone. Après avoir contraint Donald Trump, en février 2020, à négocier un accord de désengagement militaire, les combattants islamistes, qui contrôlent de fait une large partie du territoire, espèrent bientôt reprendre la totalité du pouvoir en Afghanistan. Après 250.000 morts, des centaines de milliers de blessés, des déplacements de population massifs, que sont devenues les promesses brandies par George W. Bush quand, au lendemain du 11 septembre 2001, il a lancé l’offensive qui allait chasser Al-Qaïda du pays sans jamais venir à bout de la résistance de ses alliés locaux ?
♦ Une Afghanistan marquée par le conflit
Alexandra Jousset rappelle que les Etats-Unis ont chassé les talibans de Kaboul après les attentats du 11 Septembre ; le 29 février 2020 que Donald Trump annonce que l’Amérique se désengage. Pour Barnett Rubin, conseiller du représentant spécial pour l’Afghanistan, « l’échec de la guerre est de ne pas avoir négocié directement avec les talibans« . Il affirme que, dès le début, les talibans étaient prêts à discuter ; mais que les Etats-Unis ont posé leur véto. « Une erreur » selon Barnett Rubin.
L’homme poursuit : « la Russie s’est inquiétée du fait que, un, les Etats-Unis n’arrivaient pas à éliminer le terrorisme, et deux, ils semblaient construire des installations pour une présence militaire permanente dans la région ». Des tensions, qui n’ont pas épargné les Afghans, ont éclaté entre les Etats-Unis et la Russie. La Russie n’est pas la seule à avoir négocié avec les talibans puisque la Chine les a invités à l’été 2019 pour une rencontre officieuse. Dans ce conflit afghan, chaque acteur veut devenir un arbitre.
2019 est l’année la plus meurtrière du conflit. 440.000 Afghans ont dû quitter leur foyer au cours de l’année. Ils se sont dirigés vers les grandes villes, comme la capitale Kaboul. Par conséquent, une ceinture de bidonvilles, composée de 52 camps, entoure la ville. Le conflit en Afghanistan touche aussi les enfants. Dans le pays, 2 millions d’entre eux souffrent de la faim. L’hôpital de Jalalabad ne fonctionne qu’avec l’aide de l’UNICEF. Si les talibans prennent le contrôle de la ville et du pays, des pénuries sont à prévoir.
♦ Le point de vue d’un ancien président afghan
Alexandra Jousset a pu interviewer Hamid Karzaï ; l’ancien président afghan soutenu par les Etats-Unis. Pour lui, les alliés d’hier sont devenus les opposants d’aujourd’hui. Il ne considère plus les Américains comme des alliés car les « Afghans meurent et les maisons sont bombardées ».
Il poursuit « les talibans font depuis toujours partie de ce pays ; ce sont des fils de cette terre. Ils sont afghans, on doit s’asseoir ensemble, on doit trouver un accord, et on doit se libérer de l’ingérence et de l’exploitation des puissances étrangères ». Aujourd’hui, l’homme veut avoir une influence dans les négociations et mettre à profit sa réputation de « rassembleur » .
♦ La place des femmes en Afghanistan
Pour Ashley Jackson, spécialiste des négociations avec les talibans, « les talibans ne veulent plus être perçus comme des terroristes mais comme un vrai mouvement politique ». D’ailleurs, ils revendiquent la victoire militaire et affirment avoir conquis les cœurs et les esprits.
Dans leur accord de désengagement militaire, Américains et talibans évitent la question des droits humains. Le gouvernement et la société civile n’ont pas été conviés aux négociations à Doha. Les femmes non plus. Farahnaz Forotan, journaliste afghane déclare « l’accord entre les talibans et les Américains est une négociation, un échange. C’est un jeu politique dans lequel les femmes afghanes, le peuple afghan et les gens qui ont été tués n’ont aucune place ». Militante pour les droits des femmes, elle poursuit « les femmes ne doivent pas être les victimes de ces négociations de paix car les femmes ont été victimes de cette guerre ».
Pourtant, l’Occident avait proclamé que les femmes ressortiraient grandes gagnantes de cette guerre ; et que celle-ci serait celle de la libération des femmes. Ashley Jackson confie que « les femmes ont été une excuse pour cette guerre depuis le premier jour » et « qu’elles sont devenues un prétexte« . Selay Ghaffar, porte-parole du Parti de la solidarité afghane, livre, elle aussi, son point de vue à Alexandra Jousset. Pour elle, « les Etats-Unis ont utilisé les femmes comme un outil ». Elle poursuit « ils n’ont jamais voulu instaurer un droit des femmes en Afghanistan ».
Suhail Shaheen, porte-parole des talibans, certifie qu’il était préférable d’être une femme sous le régime taliban qu’en 2020. Il prétend que « les femmes sont une partie importante de la société ». Pourtant, sous le régime taliban, les écoles de filles financées par les ONG étrangères ont été fermées dans le Wardak ; une province du centre de l’Afghanistan aux mains des talibans.
♦ Pourquoi la rédaction vous le conseille ?
Ce documentaire est on ne peut plus actuel. Il est assez complet puisque de nombreux témoignages viennent compléter les images. Les Afghans, sacrifiés au nom de la paix revient sur la place des femmes, des journalistes, sur l’éducation et aborde timidement le futur du peuple afghan.
♦ Ils font l’actualité des documentaires…
L’enfance mise à nu de Aurélia Perreau et Julien Beau qui soulève la question difficile de la représentation du corps adolescent.
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