Article mis à jour le 28 janvier 2024 à 09:13
À peine achevée l’inauguration du festival de photojournalisme Visa pour l’Image, Louis Aliot a sauté dans sa berline. Sa destination ? Baixas, une commune rurale de 2.500 âmes des Pyrénées-Orientales. Le maire de Perpignan y rejoint les militants du Rassemblement National, mais aussi ses amis et soutiens réunis pour le premier meeting du candidat – désormais proclamé – à la présidence du parti. Celui qui se défend d’être le candidat de la campagne face au Parisien Jordan Bardella a pris la parole face à 300 sympathisants et élus. Pourtant, sous l’œil des caméras des chaînes d’information en continu, cette rentrée politique aux airs de cousinade avait bel et bien pour fond sonore le chant du coq d’une mairie du sud de la France aux pierres plombées par la canicule.
Pas un candidat « paysan », mais un candidat « national avec un ancrage local »
Alors que certains voudraient le cantonner à son rôle de maire de province pour mieux l’opposer à un Jordan Bardella, champion des plateaux et député européen, Louis Aliot refuse cette étiquette. Idem quand il s’agit d’opposer « les jeunes contre les vieux ». Bardella a 26 ans, Aliot fêtera 53 ans le 4 septembre prochain. « Je crois que tout cela n’a pas de prise chez les adhérents » balaye d’un revers de main celui qui se voit déjà président du RN, offrant la vice-présidence à Jordan Bardella. Louis Aliot se décrit comme « un militant qui à l’origine n’avait pas vocation à faire de la politique. Et petit à petit, chemin aidant, je me suis totalement engagé au combat (…) ». Une candidature comme un cheminement naturel dans son parcours de militant.
Sans projet précis affiché, Louis Aliot envisage de se faire connaître des adhérents via un tour des fédérations*. Il annonce également la mise en ligne de son ouvrage « Impossible n’est pas Français« . « Je vais aller dans les fédérations des 13 régions. (…) Et je vais mettre mon livre en téléchargement libre pour les adhérents. En définitive, c’est ce qui résume le mieux mon parcours pour ceux qui ne me connaissent pas ». Le militant de la première heure du parti d’extrême droite, prend cependant le soin de préciser que le livre sera expurgé de sa préface. Pour rappel, en 2022, l’auteur de cette préface, Jérôme Rivière, avait fait le choix de franchir le Rubicon pour rejoindre Éric Zemmour.
« Recruter, recruter, recruter, nous ne sommes pas encore assez nombreux »
Cette campagne est aussi l’occasion d’occuper le terrain médiatique et recruter tous azimuts en vue de préparer les prochaines échéances électorales. « Il faut faire des adhésions et recruter des gens ! Parce que demain, ces nouveaux militants seront les cadres qui refaçonneront la nation, comme nous espérons qu’un jour nous le ferons (…) Nous avons des électeurs, mais on manque de cadres, et notamment pour conduire les prochaines échéances électorales ».
L’orchestration de cette bataille timorée entre deux personnalités du parti pourrait-elle n’être qu’un moyen d’occuper une espace médiatique ? À cette question Louis Aliot répond par la négative. « Non, ce sont deux parcours différents.
Vous savez les adhérents se déterminent sur des impressions, des sensibilités, qui sont difficiles à déterminer ». De là à en déduire que ce qui sépare les deux hommes se cantonne à une impression, il n’y a qu’un pas.
Les 30.000 adhérents à jour de cotisation affichés par le RN devront se prononcer via un scrutin numérique avant le 3 novembre. Le nom du président du RN sera dévoilé le 5 novembre lors du XVIIIe congrès à Paris. Élus et militants appellent à une « saine compétition » entre Louis Aliot et Jordan Bardella. En fin de meeting, Xavier Baudry, adjoint n’oublie pas une petite précision « si vous souhaitez voter aux élections internes de notre mouvement, je vous rappelle qu’il faut adhérer où réadhérer ».
Quid de la ville de Perpignan et ses habitants ?
Le maire de Perpignan l’assure : les Perpignanais et les Perpignanaises ne vont pas se sentir délaissés ou trahis. Au contraire, « une bonne partie d’entre eux sont heureux de voir qu’on parle de leur ville. Ça fait parler de Perpignan autrement. (…) Et puis si je suis président du RN, je serai à Paris 2 jours par semaine, comme depuis le début du mandat. Mais vous savez entre les visios, les portables et l’encadrement au sein de la nouvelle équipe, il n’y a pas matière à s’inquiéter. C’est vrai qu’une mairie ça accapare, mais je trouverai le temps. Et oui, je serai aussi impliqué que ces deux années écoulées. Mon ambition est municipale et perpignanaise, mais ma philosophie politique est nationale« .
Depuis quelques jours, le maire de Perpignan a fort à faire, notamment depuis le départ de son directeur de cabinet, Stéphane Babey. Depuis une semaine, l’affaire agite le centre-ville. Mais que s’est-il passé entre Louis Aliot et l’ancien directeur adjoint de la présidente socialiste du département ?
« Rupture du lien de confiance » se cantonne a dire le premier magistrat. « J’ai eu la preuve, que dans mon dos, il cherchait un job dans le privé. Je suppose qu’il ne voulait pas rester avec moi. Je ne vois pas pourquoi je le garderai ».
Outre l’absence de directeur de cabinet, depuis les Législatives et le non-cumul des mandats, Louis Aliot est confronté à un remaniement de son équipe municipale. Le journal l’Indépendant évoquait également les départs plus ou moins contraints de l’adjoint au sport et à l’urbanisme. Louis Aliot dément formellement cette information. « J’en ai seulement 3 à remplacer**. Il va simplement y avoir des switchs de délégations entre les élus. Certains en avaient beaucoup, d’autres pas assez. C’est dans cette reconfiguration que va avoir lieu le remaniement de mon équipe municipale ».
Ce que disent les proches de Louis Aliot
Dans une ancienne vie, Frédéric Bort fut directeur de cabinet Georges Frêche, président socialiste de la région Languedoc-Roussillon. Il est désormais conseiller régional d’opposition et à la tête de la fédération RN de l’Hérault.
« Je pense que Louis fait le pont entre le rassemblement national historique et le parti ouvert que j’ai intégré. (…) Et puis c’est un mec du sud et je suis du sud ! ».
Sophie Blanc est élue d’opposition à la Région, députée de la 1ère circonscription depuis juin 2022, et jusqu’à il y a quelques jours, elle était adjointe à l’éducation de la ville de Perpignan. « Louis est un ami, nous avons mené beaucoup de combats ensemble. Et aujourd’hui en tant que députée, je le soutiens ; tout en admirant le travail et les compétences de Jordan. Pour être à la tête d’un parti, il faut une expérience qu’on n’a pas quand on a 26 ans ».
Christophe adhérent au RN depuis 18 ans est auto-entrepreneur dans le bâtiment à Argelès-sur-mer. « Louis Aliot redynamise les Pyrénées-Orientales à tous les niveaux. Il a créé de nouvelles festivités pour rassembler les gens, pour le social. À la tête du RN, il va apporter de nouvelles idées. Même si je pense que Jordan marquera la France. Ce sera un personnage politique, mais pour l’instant, Louis Aliot a plus de maturité ».
Gilles Foxonet, maire de Baixas et vice-président de Perpignan Méditerranée Métropole : élu avec le soutien des Républicains, Gilles Foxonet rejoint Louis Aliot lors des élections départementales de 2021.« Nous avons besoin de lui, comme la France a besoin de lui ». S’adressant à celui qu’il appelle son ami : « tu vas pouvoir faire rayonner le territoire, tous les territoires (…) Nous sommes avec toi, et nous croyons en toi ! ».
Pour Sandrine Dogor-Such, nouvelle députée de la 3e circonscription des Pyrénées-Orientales, Louis Aliot est un « guide ». (…) « Il possède l’expérience, la poigne, la pugnacité (…) Louis Aliot dessine les perspectives et le chemin à suivre. Il est notre guide, car sans guide, nous sommes orphelins. Louis mettra toute son énergie et sa détermination au service de nos valeurs. Notre famille a besoin d’un leader. Notre leader naturel est Louis Aliot ».
Notes :
*Selon Louis Aliot, les candidats ont une feuille de route et une enveloppe de 15.000€ financés par les caisses du Rassemblement National.
** Les 4 députées élues à l’Assemblée nationale sont dans l’équipe de Louis Aliot ; 3 d’entre elles étaient adjointes et ont dû abandonner leurs délégations.
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